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Histoire de l'APPT avec Helga Priacel

Zoom sur l'histoire de l'APPT avec Helga Priacel, Co-fondatrice de l’Association des Personnes de Petite Taille


Le 30 mai 1976, le Professeur Claude Stoll, généticien, Maître Jean Brissé Saint Macary, notaire porteur du gêne de l’achondroplasie, et Helga Priacel, interprète de conférence et mère d’un enfant de petite taille déposent les statuts de l’Association des Personnes de Petite Taille. De-là commence une longue histoire associative …


Racontez-nous les débuts de cette aventure.

Je suis Helga Priacel, la maman de Stéfan Priacel, né le 29 avril 1969 à Paris, atteint d'achondroplasie. Le jour de sa naissance, mon fils a été mis en couveuse, on m'a avertie qu'il était vraiment très petit. Puis j'apprends qu'il est peut-être un nain achondroplase. Mon époux appelle un de ses amis médecin qui a dit "Oh merde !" et qui lui indique qu'il ne s'agit pas d'une maladie mais d'une malformation congénitale.


Et ensuite ?

Les semaines passent, je vais consulter un médecin spécialiste qui, alors que je lui posais beaucoup de questions, me répond simplement "Vous savez bien que cet enfant ne vivra pas.". J'étais seule, vraiment seule, avec mes questions. Au bout d'un an, d'autres médecins me proposent une coque en plâtre et ensuite un corset en cuir avec des baleines de métal fabriqué par l'Association des Anciens Combattants soi-disant pour éviter une malformation de la colonne vertébrale. C'était affreux.


Le hasard veut qu'un congrès sur les maladies congénitales se tienne à l'Unesco à Paris, nous y sommes en tant qu'interprètes. Nous rencontrons le professeur Victor McKusick, le père fondateur de la génétique médicale à l'Hôpital Johns Hopkins de Baltimore. Il nous conseille d'aller le voir à Baltimore dans son service spécialisé dans les personnes de petite taille et d'y hospitaliser Stéfan.


Vous vous êtes donc rendus aux Etats-Unis …

Oui, il y a de cela 50 ans, Stéfan a pu voir les différents médecins spécialistes du nanisme et l'hôpital nous a mis en relation avec l'Association des "Little People of America", c'est ce que j'attendais, j'obtiens ainsi des réponses à beaucoup de mes questions.


De retour à Paris, vous vous dites donc qu’il faudrait faire la même chose en France ?

Exactement, ainsi quelques années plus tard, le professeur Stoll qui, de retour de Baltimore, m'écrit de la part du professeur McKusick et me propose de m'aider à créer une association du même style.


Quand intervient Jean Brissé Saint Macary ?

Alors là, c'est un hasard de circonstance. Pour créer une association il fallait diffuser l'information. Mes relations me permettent de faire appel aux journaux et de trouver une salle de réunion pour cette conférence. Celle-ci était prévue Avenue Kléber à Paris. Le jour venu, la presse arrive en très grand nombre, Maître Jean Brissé Saint Macary était ce jour-là à Paris pour la sortie de son livre "1m34", il vient accompagné de sa femme et de sa fille. Adulé par la presse et les personnes présentes, près de 20 personnes de petite taille et leurs familles ou amis arrivent à la réunion et de ce fait, on décide immédiatement que Jean Brissé Saint Macary présiderait cette conférence.


Pourquoi cette dénomination “Association des Personnes de Petite Taille” ? Personne ne parlait de “nain” ou de “nanisme” ?

Il y eut une longue discussion entre "petite taille" et "nanisme", certaines personnes étaient très réfractaires au terme "nain". D'autres trouvaient le terme trop dégradant.


Personnellement je préférais qu'on parle clairement de nanisme mais d'autres préféraient le terme américain de "Little People" et nous avons donc suivi leur usage.


Par ailleurs, j'estimais que ce n'était pas à moi de décider du nom ou du titre de cette association qui était la leur et pas la mienne, moi n'étant là qu'en tant que parent d'un enfant atteint d'achondroplasie. D'ailleurs, dès le début, cela a été mon principe et je leur ai dit "Ce n'est pas mon association, mais je représente mon enfant, pour le reste c'est votre association et c'est à vous de décider"


Quelles étaient les attentes des participants quant à la création de cette association ?

Sortir de l'ombre. Être handicapé ou non, faire partie de la société. S'ouvrir à l'école, au travail, au logement, aux soins médicaux, aux aides, etc. Tant de questions fusaient parmi les participants, montrant qu'un énorme travail se présentait à nous.


Les choses vont évoluer lentement, mais on venait de si loin. Sur le plan médical, peu avait été fait jusqu'à présent, et le simple fait, à mon humble avis, d'avoir créé cette association a permis, au cours des quelques années suivantes, d'obtenir des résultats étonnants. Ainsi, en 1994, Laurence Legeai-Mallet et Valérie Cormier-Daire, médecins au service de génétique moléculaire à l'Hôpital Necker Enfants Malades, Institut Imagine, co-découvrent le gène responsable de l'achondroplasie, le gène FGFR3.


En 2022, un nouveau traitement en essai clinique est administré à un jeune enfant. Vingt-cinq ans de recherches françaises nous donnent l'espoir d'un traitement de l'achondroplasie. À nous maintenant d'obtenir une meilleure intégration sociale. Le regard des autres a peut-être changé depuis 1976, mais il reste beaucoup à faire.


L'association continue donc à œuvrer sur ces différents chantiers. On essaie de travailler davantage avec les pouvoirs publics pour que les problématiques soient traitées à l'échelle nationale. Le regard de l'autre a peut-être changé, du moins il est toujours présent, mais il se manifeste différemment. Avez-vous entendu parler du phénomène des photos prises à la volée ?

Oui, c'est odieux, vraiment odieux, et comme vous le dites, les médias ont aussi un rôle à jouer sur ce volet. Aujourd'hui, on ne peut pas dire qu'ils offrent une bonne image du nanisme. Sur ces sujets, il est important d'obtenir un appui politique. À l'époque, le lancer de nains faisait fureur, mais on a pu y mettre fin grâce à l'aide de Robert Badinter, garde des sceaux, qui a inscrit la dignité humaine parmi les principes à valeur constitutionnelle.


A ce jour, vous suivez toujours les activités de l’association. Ressentez-vous des différences s’agissant des difficultés rencontrées par les personnes de petite taille aujourd’hui ?

J’ai l’impression que, même si cela évolue bien, les problématiques de l’époque sont toujours un peu présentes.


Lesquelles ?

L’intégration scolaire, professionnelle, la reconnaissance du handicap dans les régions …


L’APPT a aidé plus d’une génération de personnes de petite taille et de parents. Êtes vous fière de ce que vous avez fait ?

Oui complètement. Je suis très contente de l’avoir créée. Je suis aussi très contente de voir qu’à force de travail, sur le plan médical, le nanisme ait vraiment été pris au sérieux. A l’époque, le corps médical ne s’occupait absolument pas des personnes de petite taille.


On voit qu’elle tente d’avancer sur de nombreux sujets : le médical, le scolaire, le sport, le regard de l’autre … il faut qu’elle continue !




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